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Les transnationales plus puissantes que l’État : vrai ou faux?
Les multinationales plus puissantes que les gouvernements, c’est l’ex-ministre libéral de l’Agriculture, monsieur Pierre Paradis, qui a eu des au moins l’honnêteté de l’admettre candidement en 2015 : «Les géants des pesticides (l’américain Mosanto) sont plus puissants que l’État» (Le Devoir, 23 octobre 2015). Admettre ce fait est grave. Ça s’assimile à du communisme corporatif. Dans un tel environnement, c’est le marché qui mène : pas le gouvernement. Elle est où la démocratie de nos sociétés occidentales que l’on prétend libres? Si en 2015 Mosanto était déjà plus puissante que l’État, qu’en est-il maintenant, puisque l’allemande Bayer a acheté en 2018 Mosanto pour la modique somme de 63 milliards$?
Si aujourd’hui les géants corporatifs sont plus puissants et plus riches que l’État c’est beaucoup grâce à la complicité des politiciens qui les accommodent tout le temps en votant des traités de libre-échange qui leur permettent de tout faire, de poursuivre les pays et de les mettre en concurrence pour le plus petit commun dénominateur; de fermer les yeux sur leur évasion fiscale dans leurs paradis fiscaux; de répondre favorablement aux grosses fusions-acquisitions; de se laisser amadouer par leurs milliers de lobbyistes; de les laisser généreusement financer leurs partis politiques et de les embaucher après leur «service» politique.
Prenons juste quelques exemples de cette domination du marché qui fait que les consommateurs se font souvent arnaquer sans que vos élus lèvent le petit doigt. Ah oui, parfois ils vont faire semblant d’être outrés par le comportement abusif des bandits à cravate et vont alors promettre des lois restrictives qui ne viendront jamais ou qui seront tellement édulcorées que dans les faits le party corporatif va continuer. Léo, à continuer à parler comme ça, tu ne seras jamais considéré par les médias comme un spécialiste prévisionniste en expertise. Tant pis pour toi!
Téléphonie sans fil et internet
Déjà en 2005, on pouvait lire : «Les Canadiens paient 60% plus cher pour le cellulaire que les Américains» (La Presse, 27 juillet 2005). Puis, ça s’est poursuivi en 2009 : «Téléphone sans fil et internet. Selon l’OCDE, les consommateurs canadiens d’ici dépensent 55 fois plus d’argent qu’au Japon pour avoir accès à Internet haute vitesse» (Le Devoir, 12 août 2009). Et en 2013, les Canadiens lancent un appel à leur gouvernement : «Les consommateurs souhaitent une plus grande concurrence (afin de faire baisser les prix)» (La Presse, 21 août 2013). Même qu’en 2017, preuve que le privé est plus puissant que l’État, le gouvernement conservateur fédéral de Stephen Harper, pourtant pro-entreprises, a voulu casser l’oligopole Bell-Télus-Rogers : «Le gouvernement fédéral veut plus de concurrence dans le sans-fil» (Le Devoir, 6 juin 2017). Il n’y a pas eu davantage de compétition et les consommateurs ont continué à payer le gros prix qui s’apparente à des impôts et des taxes obligatoires levées par les compagnies. Le 17 mars 2019, le Journal de Montréal, titrait : «L’absence de rival sérieux fait monter le prix des services». Vidéotron et Cogeco sont des rivaux sérieux au trium vera Bell-Telus-Rogers, mais ne compter pas sur eux pour faire baisser des prix qui les aident d’ailleurs eux aussi à engranger de fabuleux profits.
Le parti libéral du Canada met son grain de sel
Et voilà que le nouveau ministre libéral fédéral de l’Industrie, monsieur Navdeep Bains, qui, nous prenant pour des andouilles, s’exclame solennellement : «Bains veut une baisse des prix dans le sans-fil» (Le Devoir, 6 mars 2020). Bonne chance monsieur Bains, mais pour faire diminuer les prix, il faudrait que son gouvernement légifère. Exprimer seulement un souhait ne suffira pas à ébranler le paisible consortium privé. La notion de service public n’existe pas pour le patronat. «Téléphone cellulaire. Télus défie les libéraux» (Le Devoir, 18 février 2020). En gros, ça veut dire «tasse-toé mononcle». Ils font tellement de fric que le gouvernement pourrait au moins les obliger à aller en région pour que tout le monde ait droit à l’internet. Mais non, c’est pas payant pour ces cies et ce sont les gouvernements fédéral et provincial qui doivent payer des milliards de dollars en subventions à ces filouteurs pour qu’ils daignent aller en régions : «Internet : La CAQ veut finir de brancher le Québec» (Le Devoir, 1er septembre 2018).
Idem pour Air Canada et le CN pour le bien de qui?
Cela ne fait aucun sens. C’est comme pour Air Canada et le CN que l’on a privatisé afin d’avoir plus de concurrence et de faire baisser les prix. Dans les faits, c’est le contraire qui s’est produit et l’État est maintenant obligé de subventionner Air Canada et le CN pour les supplier à desservir les régions. Incroyable mais vrai : «Aide aux vols régionaux : le problème des prix subsiste, selon le PQ» (Le Devoir, 7 juillet 2019).
Bell en région : Fitzgibbon défend sa juste cause
Bon, Bell décide un jour de ne plus aller en régions éloignées et le gouvernement caquiste et son ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, collé au privé au lieu de décrier la navrante situation, tempère et minimise le problème en se portant presqu’à la défense de Bell : «Internet. Fitzgibbon se fait rassurant. Bell Canada sabre son programme (déjà que le dit programme était mince) en milieu rural, mais l’impact au Québec (selon sa lucide intuition) sera minime, selon le ministre» (Le Devoir, 23 août 2019). Bah, comme dit notre expert en poésie prolétarienne : «Y’a rien là».
Merveilleux privé : «Nouvelle hausse des plaintes contre l’industrie des télécoms» (Le Devoir, 2 avril 2019). Bande de chialeux, arrêtez donc de les critiquer!
La bonne solution du PQ et de QS
Il faut arrêter d’être collectivement les dindons de la farce et de laisser au privé ce qui est lucratif et de prendre à notre charge ce qui n’est pas payant pour lui et ce qu’il ne veut pas comme les régions pour Bell, Air Canada et le CN et pour les prêts risqués que nos banques laissent aux bons soins de l’État par le biais d’Investissement Québec, la Caisse de dépôt et placement, la Banque fédérale de développement, la Banque canadienne de l’Infrastructure (maintenant dirigée par un ancien président de Bell, Michael Sabia), la Société canadienne d’hypothèques et de logement, Exportations et développement Canada, etc.
Bonne idée du parti québécois et de Québec solidaire de créer des sociétés à propriété collective afin de mettre fin au scandale et que tout le Québec soit enfin, à des tarifs raisonnables, couvert par Internet : «Le PQ veut créer NumériQuébec pour brancher tous les Québécois» et «QS veut que l’État soit un fournisseur Internet» (Radio-Canada, 15 septembre 2018 et le Journal de Montréal, 2 septembre 2018).
Et aussi les banques, les pétrolières, les pharmaceutiques…
Que ça va vite! Évidemment que j’aurais pu couvrir plusieurs autres secteurs industriels dans mon texte, mais il aurait fallu que je les survole de façon superficielle. Je préfère traiter de moins de sujets afin de faire un travail un peu plus approprié et informatif. Alors, dans mon et mes prochains textes, je vous parlerai des autres secteurs d’activités, également dominés par des compagnies plus puissantes que l’État et qui se défoulent sur les consommateurs captifs.