
Il ne faut pas taxer les riches et les compagnies
Vous ne pensez tout de même pas à vouloir taxer les riches et les compagnies pour qu’ils paient le même taux d’impôt que le contribuable salarié moyen? Qu’est-ce qui vous prend? Ça doit être le coronavirus et le confinement qui ont laissé des marques. En espérant que ce soit juste temporaire et conjoncturel et non permanent et structurel.
Les élites ont leurs croisés journalistiques et politiques qui les défendent bravement, comme le populaire René Vézina qui crie au loup si vous voulez instaurer une fiscalité équitable : «La chasse aux riches est maintenant ouverte» (Les Affaires, 17 novembre 2012). Et même Denise Bombardier part à la guerre : «La haine des riches» (Le Journal de Montréal, 23 avril 2019). Et bravo à Philippe Couillard, ce preux défenseur de nos créateurs de richesse : «Les libéraux se battront contre l’angoisse fiscale» (La Presse, 26 septembre 2012).
Il ne faut pas s’attaquer non plus aux paradis fiscaux
Le nouveau patron de notre Caisse de dépôt et placement, l’ex-banquier Charles Emond, l’a dit courageusement : «Les paradis fiscaux sont là pour rester» (Le Journal de Montréal, 21 février 2020). Ils sont là pour rester afin de ne pas torturer nos pachas. Et les paradis fiscaux sont là pour rester s’ils sont utilisés par nos élites et nos banques et qu’ils privent chaque année le Canada et le Québec de milliards de dollars en recettes fiscales. Pas grave, on va aller chercher l’argent ailleurs, comme chez des salariés captifs qui reçoivent un T-4 et qui n’ont pas les moyens de se réfugier dans les paradis fiscaux. Ah oui, ce sont les mêmes Crésus qui nous disent comment gérer l’État et qui embauchent des experts universitaires par le biais de la création et le financement de chaires universitaires.
Pour la Caisse et son nouveau dirigeant, les paradis fiscaux à fiscalité de pratiquement zéro «sont simplement utilisés par la Caisse (et les autres) comme terrains «neutres»». Aimez-vous ça vous faire dire de telles âneries imbuvables? Et ils disent aussi que c’est pour mieux faire fructifier l’argent des Québécois. En plus, ils nous font complices de cette arnaque. Un vol fiscal institutionnalisé qui ne profite qu’aux puissants.
Paradis fiscaux et pétrole sale : vous êtes trop émotifs
Le nouveau p.d.g. de la Caisse l’a dit : «Les paradis fiscaux sont un sujet chargé d’émotions». Calmez-vous donc le pompon et respirez par le nez. Couillard vous l’a dit : il ne faut pas angoisser fiscalement nos riches. Pas touche à la taxation des riches sinon la charmante Denise Bombardier va vous accuser de les haïr. Le Christ l’a dit : «Il faut aimer son prochain». Idem pour le pétrole sale issu des sables bitumineux de l’Alberta et de ses pipelines, les sénateurs, des gens parfaitement inutiles, vous l’ont dit : «Pipelines. Le Sénat juge que les citoyens sont trop émotifs» (Le Devoir, 9 décembre 2016). Si seulement ils n’étaient pas qu’inutiles mais non, ils sont aussi moralistes et propagandistes. La morale de l’histoire est que si vous étiez moins émotifs, vous verriez le bon côté des paradis fiscaux et des sables bitumineux. Mais hélas, l’émotion vous aveugle.
Mieux vaut être vertueux que coercitif
La coercition brime les libertés individuelles de tout faire ou presque, et ça, ce n’est pas gentil. Même si elle détient sept filiales aux Îles Caïmans et une autre aux Bermudes, la Caisse et ses patrons sont en principe et en théorie contre les paradis fiscaux, qu’il ne faut toutefois pas éliminer par des lois coercitives mais par la discussion vertueuse qui s’assimile à de l’hypocrisie : «Chaque fois que c’est possible (souvent, ce ne l’est malheureusement pas), la Caisse s’empresse (mais pas trop vite et sans brusquer personne) d’influencer ses partenaires pour établir les structures financières à l’extérieur de ces juridictions (paradis fiscaux)» (Le Journal de Montréal, 13 juin 2020). Excellente chronique de Michel Girard. Être un partenaire de la Caisse, je lui répondrais ceci : commence donc par le faire toi-même en fermant tes propres filiales établies dans les paradis fiscaux. Quelle hypocrisie que de nous larguer de telles inepties. Une insulte à notre intelligence. La Caisse essaie donc supposément de conseiller ses associés d’affaires à ne pas y recourir mais elle, elle y brasse des transactions depuis très longtemps comme le démontre cette découpure du journal La Presse remontant à 2002, que j’ai ressorti de mes bons vieux dossiers : «La Caisse de dépôt admet utiliser des paradis fiscaux pour maximiser ses gains» (La Presse, 9 mars 2002).
Mieux vaut partir à la chasse du petit gibier
Quand vos élus prétendent qu’ils mènent une guerre acharnée contre l’évasion fiscale dans les paradis fiscaux, ils mentent. Par contre, ils ne lésinent pas dans leur lutte qu’ils font en permanence avec des méthodes musclées contre les délinquants ordinaires. C’est la politique du deux poids, deux mesures.
- «Coronavirus et prestation canadienne d’urgence (PCU). Ottawa se lance dans la chasse aux fraudeurs» (Le Devoir, 10 juin 2020);
- «Chômeurs. Service Canada espionne. Les inspecteurs pensent surveiller les prestataires embusqués dans leur voiture» (Le Devoir, 5 mars 2013);
- «Assurance-emploi. Des fonctionnaires effectuent des visites-surprises aux chômeurs» (Le Devoir, 21 février 2013);
- «Haro sur la traque aux fraudeurs de l’aide sociale» (Le Devoir, 26 juin 2014).
La Caisse veut doucement conscientiser les pollueurs
Et oui, la Caisse de dépôt et placement du Québec, en plus d’être présente dans les paradis fiscaux, investi aussi des milliards de nos dollars dans les énergies fossiles, comme le pétrole et le charbon, les pipelines et les gazoducs : «Environnement. La Caisse de dépôt invitée à faire plus» (Le Devoir, 4 juin 2020). Bon, comme pour les paradis fiscaux, elle va continuer à investir dans les énergies fossiles mais un peu moins. Les paradis fiscaux et les énergies fossiles relèvent de sa responsabilité sociale et à titre d’instrument collectif, ils sont faits en notre nom.
Des réformistes et non des radicaux
Les dirigeants de la Caisse de dépôt ne sont pas des radicaux qui vont désinvestir complètement des hydrocarbures afin de réduire leur empreinte carbone. Non, ce sont des gens qui savent vivre. À la manière sauvage de tout liquider, ils préfèrent, comme pour les paradis fiscaux, dialoguer et conscientiser les pétrolières au méfait de la pollution sans toutefois les irriter. Vraiment touchant, moi ça me fait pleurer : «La direction de la Caisse préfère dialoguer (dans lesquelles elle a investi) plutôt que de quitter le secteur des énergies fossiles. Plutôt que de se désengager, nous travaillons à influencer nos entreprises en portefeuille pour qu’elles adoptent les meilleures pratiques et qu’elles renforcent l’intégration des facteurs EGS (émissions de gaz à effet de serre) dans leurs décisions d’affaires» (Le Devoir, 4 juin 2020). Bien oui, la Caisse se fait missionnaire pour lutter contre les paradis fiscaux, les pétrolières et les mines de charbon polluantes, etc. Une lutte menée en douceur en partant et surtout pas de manière brutale en se retirant de ces domaines. On nous sert des arguments primaires et hypocrites, et ils pensent que l’on va les croire.
Le fonds norvégien fait différemment de la Caisse
Les Norvégiens sont-ils devenus des révolutionnaires? «Environnement. Le fonds norvégien (environ 5 fois plus gros que la Caisse avec des actifs de plus de 1500 milliards de dollars) abandonne les sables bitumineux» et «La Norvège retire ses billes du pétrole» (Le Devoir, 14 mars 2020 et 3 octobre 2019).
Oui, l’approche humaniste de la Caisse porte ses fruits
Oui, les preuves sont faites que l’éducation et la pédagogie sociales adoptées par notre Caisse chérie sont la voie à suivre et qu’elles portent ses fruits. Vous voulez une preuve des bienfaits des mesures humanistes et consensuelles de la Caisse fonctionnent, même auprès de très grandes transnationales pétrolières comme l’anglaise BP, alors lisez le titre de ce récent article paru le 9 juin 2020 dans le Devoir : «Confronté à un marché pétrolier déprimé, BP supprime 10 000 emplois dans le monde… mais maintient son dividende annuel de l’ordre de (seulement) 7 milliards de dollars». Le marché pétrolier est déprimé qu’ils disent. Mais pour ne pas déprimer les actionnaires, on maintient courageusement le paiement du dividende annuel de 7 milliards$. Pour ce faire, mieux vaut «déprimer» les employés ordinaires en abolissant, comme ça, 10 000 jobs. Pourquoi faire compliqué quand c’est si simple?