Nationalisons Air Canada

Renationalisons Air Canada et le CN

Je le sais que les lucides vont dire que je suis plus flou que jamais. Ces universitaires (Fortin, Godbout, Montmarquette, Gagné, Boyer, etc.), ces chroniqueurs et éditorialistes (comme Robert Dutrisac dans sa chronique du 6 juillet 2020) et évidemment les affairistes en ont que pour les privatisations de tous nos services publics et instruments collectifs, sauf ceux qui ne sont pas payants, comme ceux situés en régions, pour les écoles pognées avec des cas problèmes, pour les maladies longues et couteuses à soigner, etc. Il ne faut pas être moderne pour parler de nationalisations de sociétés qui seraient alors détenues par l’ensemble des citoyens plutôt que par une poignée d’actionnaires et de capitalistes. À ces profiteurs, je pose la question suivante : au nom de quel a priori, nous, collectivement on ne peut pas être dans ce que l’on veut et quand on le veut? On ne peut même pas parler de nationaliser nos ressources naturelles qui sont pourtant un bien commun. Je dois arrêter, sinon je ne serai jamais intronisé au temple de la renommée des lucides avec Lucien Bouchard, l’économiste Pierre Fortin et l’ex-chroniqueur au Journal Les Affaires, désormais au Journal de Montréal, Joseph Facal. Tant pis pour moi, j’ai ce que je mérite. Une drôle pour me calmer : «M. Legault a promis (en 2018) qu’il négocierait lui-même avec Air Canada des prix plafonds pour les billets d’avion» (Le Devoir, 15 septembre 2018). J’aimerais rappeler à M. Legault qu’Air Canada ne négocie pas, elle impose.

Dans les années 1990, lorsque le gouvernement fédéral a privatisé pour des pinottes (qui s’apparente à une arnaque), sans aucune étude probante et en absence de consultations publiques, des joyaux collectifs comme Air Canada, le Canadien national (CN), maintenant détenue majoritairement par des Américains, Pétro-Canada, Canadair à Bombardier, les Arsenaux canadiens (armements) à SNC-Lavalin, Téléglobe et Télésat à Bell et à l’affairiste de la CAQ, Charles Sirois, etc., tout s’est déroulé rapidement et rondement. Privatisations, sous-traitance, partenariats public-privé et autres bébelles comme ça étaient la voie à suivre afin de moderniser, adapter et réingénierier l’État en le rendant plus petit et principalement au service des créateurs de richesse.

Dites-moi, la privatisation d’Air Canada, du CN, de Pétro-Canada a-t-elle été bénéfique à l’ensemble des citoyens? À qui a-t-elle profité sinon aux dirigeants et aux actionnaires privés? Ces privatisations ont-elles enrichies l’État ou une certaine minorité? Ces privatisations ont-elles atténuées les inégalités économiques criantes ou les ont-elles exacerbées? Les pays africains qui regorgent de ressources naturelles (pétrole, minerais et forêts) seraient aujourd’hui riches s’ils étaient restés propriétaires de leurs richesses. Ben non, les prédateurs occidentaux avec l’aide de politiciens corrompus s’en sont emparés au nom de la démocratie.

Privatisation partielle et conditions à respecter

Au moins, lorsque nos élus affranchis, provenant et retournés au privés, ont privatisé le CN et Air Canada, s’ils avaient eu le moindrement à cœur l’intérêt collectif et le bien commun, auraient pu, comme cela a été fait ailleurs, exiger que l’État conserve environ 30% des actions afin d’avoir son mot à dire, au nom de la majorité, sur les tarifs, sur les services à rendre en régions, sur la délocalisation appréhendée d’emplois, sur la sous-traitance, sur le contrôle étranger ou la vente d’une partie importante de ses activités, sur la rémunération des dirigeants, etc. Il me semble que ça ne prend pas la tête è Papineau pour comprendre ça, surtout dans le cas d’entreprises opérant dans le domaine des services publics comme Air Canada et le CN, et si importants pour notre sécurité et notre souveraineté nationales. Dans le cas du CN, le gouvernement fédéral aurait dû conserver la propriété des voies ferrées afin de donner priorité aux trains de passagers et non de marchandises comme le fait le CN. Mais non, aujourd’hui le CN et Air Canada font ce qu’elles veulent et se fichent totalement des citoyens et des élus.

Nos députés et ministres ne savaient-ils pas que pour les compagnies privées, leur rôle social se limite à être responsables qu’envers leurs actionnaires et à l’atteinte du profit maximum en tout temps, quitte à délocaliser et à sous-traiter des emplois, à faire usage de paradis fiscaux, à laisser à l’État ce qui n’est pas payant comme les régions, etc.?

Des privatisées qui se retournent contre vous

Que c’est beau et courageux de la part de Justin Trudeau qui a dit qu’il était «déçu» qu’Air Canada délaisse les régions. Justin Trudeau ne veut pas brimer la liberté des géants corporatifs plus puissants que l’État. Il a dit «espérer» que le monopole aérien privé revienne sur sa décision. En passant, les lucides vont vous dire tout le temps que les monopoles publics sont à proscrire mais pas les bons monopoles privés comme le pharmaceutique, les banques, les pétrolières, l’alimentation au détail, MasterCard-Chargex, les ponts et les autoroutes, le sans-fil et l’internet, le CN-CP, etc. Comprenez-vous quelque chose à leur raisonnement? Vous méritez bien une autre comique : «Transport aérien régional : les maires veulent casser le monopole d’Air Canada» (Le Journal de Montréal, 27 septembre 2017). À ce jour, ils n’ont rien cassé.

Il faut une société québécoise avec la présence de l’État

Vous le savez fort bien, Air Canada, comme les pharmaceutiques, les alumineries, les forestières, les docteurs, etc., sont des abonnés au chantage perpétuel et nos élus complices cèdent toujours. Il ne faut pas irriter ceux qui financent votre parti politique et qui vont plus tard vous embaucher. Alors, Air Canada va exiger plus de subventions, elle qui ne prend que les circuits payants. Il faut dire non à ça comme la CAQ aurait dû dire non aux médecins comme elle l’avait promis en campagne électorale 2018 et couper leurs grosses paies d’un milliard de dollars par année.

Sans créer au Québec une entreprise aérienne détenue à 100% par l’État, la CAQ pourrait forcer les petites sociétés aériennes à se regrouper afin de fonder une nouvelle compagnie aérienne québécoise dans laquelle le gouvernement du Québec détiendrait une participation d’environ 30% et le droit d’élire le tiers des administrateurs afin d’avoir une minorité de blocage dans l’hypothèse d’une offre étrangère hostile d’achat, d’avoir le pouvoir de fixer des tarifs raisonnables, de déterminer les régions à couvrir et les horaires, etc.  

Si l’Allemagne, la France et les Pays-Bas le font

Si je suis déphasé, alors je me console car je ne suis pas le seul. Au mois de juin 2020, le gouvernement allemand, qui est loin d’être dirigé par des radicaux de gauche, a pris une participation de 20% de la transnationale Lufthansa (beaucoup plus grosse qu’Air Canada, elle qui détient près de 800 avions) moyennant l’injection de 9 milliards d’euros : «L’État allemand devient actionnaire de Lufthansa» (Le Devoir, 26 mai 2020).

Que vois-je à la lecture de cet autre article du Devoir publié le 25 avril 2020 et intitulé : «Les États (France et Pays-Bas) débloquent 11 milliards pour sauver AirFrance-KLM». J’apprends donc alors que les États français et néerlandais détiennent chacun un bloc d’actions de 14% chacun, ce qui fait, si mes calculs sont bons, 28% détenu par les gouvernements.

Pourquoi le gouvernement canadien n’a-t-il pas fait la même chose lorsqu’il a privatisé à gogo Air Canada dans les années 1990? En privatisant entièrement Air Canada, ces élus complices savaient qu’ils auraient à céder dans le futur au chantage d’Air Canada et que contrairement à ce que dit la maxime : «Air Canada mordrait (comme le CN et Bombardier) la main des gouvernements qui la nourrissent» afin d’être gavée toujours plus de fonds publics. Entre les malades en régions qui ont besoin du transport aérien et les actionnaires, le choix est facile à faire pour Air Canada, n’est-ce pas? Pourquoi se compliquer la vie inutilement? Dernière nouvelle : Legault n’a pas encore réussi à convaincre Air Canada à baisser ses prix et les maires en régions ne sont pas parvenus à casser le monopole d’Air Canada. Au contraire, Air Canada veut acquérir Air Transat. Monsieur Legault a traité notre système de santé publique de «monstre». Alors comment il devrait qualifier Air Canada, le CN, Bombardier et SNC Lavalin?

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