
Conférence organisée par la Chambre de commerce
Mi-novembre 2016, la Chambre de commerce organisait une conférence intitulée «Amélioration et innovation dans le réseau de la santé». Première question : d’après vous, comment et de quelle façon le patronat vise-t-il à «améliorer» et à «innover» notre système de santé publique? Très subtil comme titre de conférence messieurs les affairistes qui s’enrichissent grâce au démantèlement de l’État et à la privatisation des services publics, qui n’ont que le nom comme privatisation, étant, comme vous le savez, subventionnés massivement par le gouvernement avec notre argent comme les écoles, les garderies, les cliniques et hôpitaux supposément privés. Bien évidemment, à ladite conférence «scientifique» étaient présents plusieurs représentants et lobbyistes des transnationales pharmaceutiques occidentales et, pour l’apparence, quelques dirigeants de petites biotechs québécoises qui, à la première occasion d’affaires, sont vendues à de grosses pharmas étrangères, comme cela a toujours été le cas dans le passé et comme je l’ai démontré, avec preuves à l’appui, dans mes textes passés.
Un conférencier de marque à la conférence de la Chambre de commerce
Comme conférencier principal invité, il y avait au menu l’ex-ministre libéral de la Santé, Gaétan Barrette, qui en a alors profité pour annoncer de bonnes nouvelles aux pharmaceutiques profiteuses pour qui la santé n’est que marchandise sujette à de gros profits et pour qui le bien-être de leurs actionnaires et dirigeants importe plus que celui des malades.
Pour ceux et celles qui ne s’en souviennent pas, le fabuleux Barrette est celui qui, nous prenant comme toujours pour des imbéciles, nous avait largué cette ineptie insultante : «Des coupes «agressives» pour garantir la survie du système de santé» (Le Devoir, 26 juin 2014). On aura tout vu et tout entendu de ces libéraux subjugués aux besoins du privé et des anglos. Ça prend vraiment une personne endoctrinée et asservie jusqu’aux trognons pour nous dire sans rire qu’il faut couper et privatiser si l’on veut encore avoir droit à un système de santé publique ratatinée. Ainsi, au lieu d’attendre 20 heures à l’urgence, vous attendrez deux jours (vous aurez toutefois droit d’apporter votre sac de couchage); au lieu d’attendre 2 ans pour avoir droit à un médecin de famille, vous devrez patienter 4 ans et devrez compter quelques mois de plus avant d’être opérés. Par contre, si vous allez au privé, il n’y aura pas d’attente à l’urgence, vous aurez droit immédiatement à un médecin de famille et vous serez opéré très rapidement. Voilà la façon originale et moderne pour le patronat «d’améliorer» notre système de santé publique et de s’affranchir de notre immobilisme anachronique et sclérosé qui interdit toute «innovation».
Ce n’est pas la subtilité qui l’étouffe
Dans la même ligne de continuité d’innover et d’améliorer, par le biais des coupures et des privatisations (le Québec est la province au Canada qui fait le plus appel au privé en santé), Gaétan Barrette a largué cette autre perle, laissant transparaître son biais pour la santé privée, lui qui dirigeait, avant son entrée fracassante en politique, sa lucrative firme de radiologie privée : «Un débat sur le panier de services s’impose, dit Barrette» (Le Devoir, 13 novembre 2015). Un appel clair et direct à la privatisation : ça ne peut pas être plus évident. Pour le PLQ, privatiser et couper relevait du «bien commun» et représentait un «projet de société».
Revenons à notre conférence de la Chambre de commerce
Bonne nouvelle pour les riches pharmaceutiques. Barrette promet alors d’ouvrir (davantage) les portes aux pharmaceutiques de notre système de santé publique et de leur fournir gratos toutes nos données personnelles colligées par la RAMQ (Régie d’assurance-maladie du Québec) afin de supposément stimuler la recherche au Québec, de découvrir de nouveaux médicaments et traitements et d’attirer des pharmaceutiques au Québec. À cet effet, le PLQ et Barrette ont annoncé à cette occasion le lancement d’un Bureau de l’innovation doté d’un budget de 15 millions$ financés par le gouvernement. Oh que Gaétan Barrette a fait plaisir une fois de plus aux «entrepreneurs» créateurs de richesse pour tous, tellement que le p.d.g. de la Chambre de commerce n’a pu s’empêcher «de remercier le docteur Barrette de dire des choses qu’on a pas assez entendues de la part d’anciens ministres de la Santé».
C’est cette même patente de fous que récemment le flamboyant ministre caquiste de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, nous a présentée comme étant «winner» : «Fournir vos données personnelles aux pharmaceutiques, c’est winner. Québec (la CAQ) veut attirer des firmes pour jouer dur dans nos platebandes et profiter de ça» (Le Journal de Montréal, 20 août 2020).
La démocratie est une fable
Voilà un autre exemple probant qui illustre parfaitement que la démocratie est un mirage au Québec et en Occident. Dans les faits, c’est l’infime minorité du 1% de puissants qui mène et qui dicte la marche à suivre. Remplacez plutôt la démocratie par oligarchie ou par ploutocratie. D’ailleurs, Philippe Couillard l’avait bien dit en 2013 : «Non, la majorité n’a pas toujours raison (ou très rarement). Le courage politique consiste à affirmer et à maintenir (et à imposer) des positions différentes si elles s’appuient sur des principes profonds» (La Presse, 12 janvier 2013). Les principes profonds des membres de la haute et riche société et des transnationales bien évidemment. Du temps des libéraux, il aurait été plus simple et plus économique de fermer le parlement, de licencier les députés et de faire gérer le Québec par la Chambre de commerce.
Le PLQ au service du patronat : une tradition
Le PLQ, sous Charest et Couillard, a toujours été assujetti aux diktats et au financement du privé et des anglos et un abonné de la corruption. Prenons quelques exemples impliquant l’ex-ministre de l’Environnement Pierre Arcand. Plus ça change et plus c’est pareil au PLQ : «Le ministre libéral de l’Énergie et des Ressources naturelles (Pierre Arcand) expose les grandes lignes de la future politique énergétique devant un cercle restreint» (Le Devoir, 16 janvier 2016). Un petit cocktail organisé par une grosse firme d’avocats (des lobbyistes de première classe) et une boîte de relations publiques en présence de gens d’affaires.
En 2014, le même Pierre Arcand avait assisté à une autre soirée privée organisée par Transcanada (devenu TC Energy) qui fait dans les pipelines, les oléoducs, le gaz et le pétrole. Et à titre de lobbyiste : «Jean Charest a voulu organiser une rencontre entre Transcanada et Ottawa» (Le Journal de Montréal, 11 septembre 2014 et Le Devoir, 4 mars 2016). La devise du PLQ : les copains d’abord!
Jouer sur les mots et rire du monde
En 2016, à ladite conférence de la Chambre de commerce de Montréal, à laquelle assistaient les dirigeants et les lobbyistes des cupides pharmaceutiques, Gaétan Barrette a bel et bien privatisé, une fois de plus, notre système de santé publique aux médecins, aux affairistes et aux pharmaceutiques, en leur donnant «gratos» nos données personnelles recueillies par la RAMQ. Mais, pour lui et découlant de sa conception étriquée du privé versus le public, il n’y a pas de différence entre le privé et le public. Ce gars-là est dangereux, c’est moi qui vous le dis : «Le ministre Barrette veut éliminer (par sa pédagogie particulière) la culture (ce n’est qu’une question de culture) qui oppose public et privé» (La Presse, 21 novembre 2017). À cet effet, il a fait cette mise en garde aux journalistes : «Ce n’est pas une question de privatisation. N’allez pas écrire que j’ai parlé de privatiser le système de santé. J’ai dit : interface, et elle est incontournable et vitale». Alors interface, ce n’est pas privatiser (tant qu’à jouer stupidement sur les mots) pour Gaétan Barrette, comme «Regrouper n’est pas fusionner, dit Barrette» (Le Devoir, 13 octobre 2017). Vraiment imbu de sa propre personne ce monsieur. Barrette est comme l’avocat personnel de Donald Trump qui a dit : «La vérité n’est pas la vérité (Le Journal de Montréal, 21 août 2018). Et comme Trump et sa gang l’ont mentionné : il y a les faits et il y a les faits alternatifs.