
Encore des belles grosses promesses mensongères
Tous les traités de libre-échange ont été voulus par le patronat parce que cela allait profiter principalement aux grandes entreprises occidentales, qui n’auraient ainsi plus d’impôts douaniers à payer dans le futur; qui auraient le droit de tout faire ou presque au nom de la liberté d’entreprendre; qui auraient le droit de poursuivre en justice les États démocratiques en cas de refus gouvernemental; qui pourraient dorénavant mettre tous les pays et travailleurs du monde en concurrence pour le plus petit dénominateur et pour celui qui les subventionnera le plus et les fera payer le moins d’impôts. Et c’est ce qui est advenu : les transnationales occidentales sont devenues plus puissantes que les États, qu’elles ont mis sous leur tutelle, faisant de la démocratie représentative des pays occidentaux un mythe.
En fouillant encore dans mes vieux dossiers d’articles de journaux
Bien évidemment, comme ce fut le cas pour toutes les autres commandes, le patronat a pu compter sur l’appui indéfectible de ses merveilleux médias d’information, qu’il détient, afin d’amplifier et de bonifier l’ampleur de ses recommandations et de retenir surtout les avis exprimés par ses experts qui pensent de la bonne façon afin de glorifier les vertus du libre-échange, qui allait supposément profiter à toutes et à tous. Sans rien changer de fondamental dans l’économie véritable, la richesse nous sortirait dorénavant par les oreilles seulement par l’application de mesures fiscale, comme celles d’exempter les entreprises exportatrices d’impôts douaniers et de leur permettre de tout faire sans les embêter avec la promulgation de lois et de règlements tatillons et coercitifs jumelés avec l’interdiction de toute forme de nationalisation. On va faire en sorte que tout devienne marchandise à octroyer au marché, même les services publics comme l’éducation et la santé. Il fallait être de mauvaise foi ou ignorant de croire que, comme ça, tous les pays et tout le monde, du patron à l’ouvrier, sortiraient gagnants de ces nouveaux traités de libre-échange que les politiciens et le patronat ont toutefois négocié en catimini et sans jamais recourir à un référendum afin de savoir ce que la population voulait vraiment. Il n’y aurait que des gagnants et aucun perdant…
Mentir afin de vous appâter
Afin de vous remplir comme des valises, les élus et le patronat y ont mis le paquet avec des avantages escomptés vraiment débiles. Comment nos journalistes ont-ils pu publier de telles folleries, voire même les appuyer? Aucun respect pour la population ordinaire. Par exemple, le négociateur canadien du traité du libre-échange avec les États-Unis, Simon Reisman, a été dire le plus sérieusement du monde que : «Reisman prédit que le libre-échange va faire hausser les salaires des travailleurs de 25%» (La Presse, 11 octobre 1987). Et nos médias qualifiaient ce genre d’énergumène «d’expert» plutôt que de charlatan. Bien évidemment que le monsieur savait qu’il mentait en toute connaissance de cause. Mais, pour lui, c’était toutefois mentir pour une cause juste et noble.
Et il y a eu Brian Mulroney, celui qui a dit que Donald Trump était un gentleman et qui préside le conseil d’administration de Québecor : «Libre-échange : Mulroney promet mer et monde (et encore plus) aux Canadiens» (Le Devoir, 17 juin 1986). Un autre adepte de la menterie. Bien évidemment, le Canada serait le grand gagnant, plus que les USA, de ce marché de dupes avec des fabuleuses créations d’emplois et de mirobolants investissements : «Le libre-échange créera 120 000 emplois» et «Le libre-échange vaut un milliard d’investissements (non subventionnés, car cela est proscrit en théorie dans de tels traités) en 1989 et un autre milliard en 1990 selon l’organisme de recherche patronal du Conference Board» (La Presse, 15 janvier et 11 novembre 1988). À ajouter une autre illusion formulée : «Libre-échange : le bois… en bénéficiera davantage» (Le Devoir, 15 mai 1986). Les faits : «Bois d’œuvre. Washington en remet. Des droits de 12,6% s’ajouteront à ceux de 19,3%» (Le Devoir, 1er novembre 2001).
Les programmes sociaux bonifiés, les subventions annulées et les impôts augmentés qu’ils disaient
Que les groupes communautaires et les détestables syndicats sont des rabat-joies qui veulent faire peur au monde qu’avait dit l’éminent professeur d’économie à l’UQAM, Pierre Fortin, celui qui pense toujours comme le patronat et qui a applaudi les mesures d’austérité de Couillard, qui prône pour l’impôt zéro des compagnies, qui veut privatiser Hydro-Québec et plein d’autres bonnes idées «socialistes» que les médias adorent : «Le libre-échange. C’est fou de dire que les programmes sociaux sont menacés» (La Presse, 29 octobre 1988). Fou toi-même Pierre, car quelques mois après tes belles paroles rassurantes sur la sauvegarde de tous nos services publics, il se trouve que le patronat, celui-là même qui prétendait que tous allaient s’enrichir équitablement, a exigé, une fois l’entente signée bien évidemment, que : «Le libre-échange rend urgente une baisse des programmes sociaux. L’Association des manufacturiers» (La Presse, 1er mai 1989). Baisse des programmes sociaux qui deviennent des marchandises ordinaires relevant du privé et entrant dans les règles du traité de libre-échange. Ça n’a pas pris de temps avant que le chat sorte du sac et que le patronat montre ses vraies couleurs. Les salaires des travailleurs ordinaires n’ont pas augmenté en raison des délocalisations favorisées par ces traités et de la venue au Canada de travailleurs étrangers dits «temporaires». En fait, ils baisseront puisque privatisations des services publics s’apparentent avec grosses primes d’assurances à payer pour la santé privée et des gros impôts à payer dorénavant aux grosses firmes privées plutôt qu’à l’État, pour l’éducation, les garderies, l’eau, les ponts, etc. De plus, privatisations des services publics (préposés, surveillance, ménage, etc.) s’accompagnent de salaires amputés pour les chanceux, ceux qui ont été transférés du public au privé, comme les gardiens de sécurité, les employés d’entretien, les préposés aux bénéficiaires, etc. À qui profite le crime?
Avec l’ALENA, les compagnies vont payer plus d’impôts
Contrairement aux prétentions mensongères avancées par le patronat, ses élus et ses commandités, les impôts des compagnies ont été réduits considérablement au Canada depuis 1970 (impôts sur le revenu, impôts douaniers, taxe de vente des manufacturiers, taxes d’accise, etc.) et les subventions publiques aux entreprises ont explosé. Ce qui a dynamité les inégalités économiques. Cela n’a aucun bon sens. Les impôts des compagnies et des riches ont tellement diminué que les gouvernements fédéral et provincial ont encaissé des déficits budgétaires pendant des périodes de croissance économique. Afin d’atteindre leur politique de déficit zéro, les élus guidés et tenus en laisse par le patronat ont coupé dans les services publics plutôt que de taxer davantage les gros revenus afin d’accroître les recettes fiscales de peur d’être privés de financement politique et de ne pas hériter d’une belle grosse job dans le privé après leur service politique. Ce n’est certainement pas les vieux parqués dans les CHSLD et les gueux qui vont les faire vivre après leur pause politique. Des élections, ça ne se fait pas avec de bonnes intentions, ça prend de l’argent pour financer les partis politiques.
Encore une fois, ça n’a pas pris de temps au patronat de renier ses belles promesses car, début 1989, le patronat canadien a exigé des gouvernements des baisses d’impôts sur le revenu afin que, supposément, nos joyaux corporatifs canadiens soient compétitifs avec les firmes américaines et européennes. En vérité, l’impôt est un fardeau secondaire dans le fait d’être compétitif ou non. Dans plusieurs secteurs d’activités, même si nos entreprises n’avaient aucun impôt à payer, elles seraient incapables d’être compétitives avec les compagnies occidentales russes et chinoises, et ce dans plusieurs domaines : «Libre-échange : des exemptions fiscales pour les entreprises canadiennes» (La Presse, 29 mars 1989). Au lieu d’accorder des baisses d’impôts, pourquoi, dans ce cas, ne pas annuler les ententes de libre-échange?
Conséquences fiscales des traités de libre-échange
Plutôt que de préconiser des politiques fiscales progressives et équitables, nos gouvernements, sous la tutelle du patronat, se sont servis du prétexte de la mondialisation pour réduire substantiellement l’impôt sur le revenu des corporations. Ainsi, juste au niveau fédéral, le taux d’impôt sur le revenu des compagnies est passé de 40% en 1970 à 28% en 2000 puis à 15% en 2021. Et ici on parle du taux d’impôt statutaire ou légal que personne ne paie en raison des nombreuses exemptions fiscales accordées aux entreprises et grâce à l’usage intensif des populaires paradis fiscaux qui se sont multipliés. Sachant que chaque baisse d’un point d’impôt diminue les recettes fiscales d’Ottawa de 2 milliards de dollars, ça fait que le gouvernement fédéral se prive volontairement chaque année de 50 milliards de dollars (40-15=25 points x 2 milliards) uniquement à ce niveau. Et il ne faut surtout pas suggérer d’augmenter l’impôt des compagnies et des nantis, au risque de se faire tomber sur la tomate par plusieurs journalistes, chroniqueurs et universitaires émérites. Il faut plutôt suggérer de tarifier les services publics et d’augmenter la TPS-TVQ et même de taxer la nourriture. Là ils vont vous qualifier de pragmatiques et de visionnaires.
Le libre-échange a favorisé les délocalisations et les poursuites
Dorénavant, les compagnies peuvent tout faire et rien ne peut les empêcher d’exercer leurs droits de polluer et d’exploiter la main d’œuvre. Alors en vertu des traités de libre-échange : «Interdiction de la fracturation : les gazières veulent poursuivre Québec» et «Frustrée par Québec, une pétrolière américaine, Lone Pine Resources, réclame 250 millions… d’Ottawa. Elle assoie son recours sur l’ALENA» (Le Devoir, 21 août 2018 et 4 octobre 2013). Biden et Obama rejettent le pipeline Keystone XL? Tant pis pour eux. Grâce aux clauses de l’ALENA : «TransCanada veut 15 milliards$ en dédommagement» (Le Journal de Montréal, 26 juin 2016). 15G$, il n’y a rien là! La Colombie a aussi signé un traité du genre avec le Canada. Bravo! Le gouvernement colombien, voulant créer un parc national sur un territoire autochtone qu’une minière canadienne voulait exploiter, il se trouve que terriblement frustrée d’être ainsi brimée dans ses droits de tout faire et en tous lieux : «La minière Cosigo Ressources poursuit la Colombie pour (seulement) 22 milliards» (Radio-Canada, 22 février 2020).
Le temps passe trop vite, ce qui m’oblige à parler des délocalisations d’usines occasionnées par le libre-échange dans un autre texte à venir ainsi que l’obligation de subventionner les transnationales.