L’expert du JDM a dit qu’il ne faut pas taxer les banques

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1022414/pratiques-bancaires-examinees-agence-federale

Le secteur bancaire canadien est un oligopole de fait, pour ne pas dire un cartel

Comme je le mentionnais dans mon dernier article intitulé «La dictature de la rapace bancaire», que je vous invite cordialement à lire, je répétais les propos de la renommée revue internationale The Economist qui indiquait ceci : «Les cinq grandes banques canadiennes forment un oligopole confortable. Elles se sont partagé (fraternellement entre elles) un marché intérieur (Le Canada) lucratif et elles ont mis fin aux guerres de prix (pas de chicane dans la cabane). Il en résulte que les Canadiens (les chanceux) paient plus cher qu’ailleurs leurs services financiers (frais bancaires, taux d’intérêt hypothécaire et sur les cartes de crédit, etc.)» (Les Affaires, 22 mai 2010). Comme les pétrolières, elles augmentent toutes leurs frais et taux en même temps.

Abonnées aux juteux bénéfices en tout temps

En raison de cet oligopole «humanitaire», les cinq plus grandes banques canadiennes engrangent des profits milliardaires chaque année. Même en 2009, durant la sévère crise financière et aussi durant les années de pandémie causée par la COVID-19. Pendant la crise financière de 2007-2009 et la pandémie actuelle, nos banques canadiennes ont réalisé des profits records en plumant les consommateurs. Grâce à des politiciens bienveillants, dont plusieurs proviennent du secteur bancaire, elles ont même eu droit à des milliards de dollars en subventions publiques. N’est-ce pas formidable?

Dernier trimestre terminé le 31 juillet 2021 : de dodus profits

Au cours du dernier trimestre, nos cinq grandes banques canadiennes ont, pandémie ou pas, déclaré, comme à l’accoutumée, des profits records de 14,4 milliards de dollars, dont 4,3G$ pour la Royal Bank et 3,6G$ pour la Toronto Dominion Bank. Les bénéfices de la mafia du dernier trimestre clos le 31 juillet 2021 ont bondi de 60% par rapport à l’année précédente. Il ne faut pas être un génie pour engranger de gros profits lorsque l’on opère dans un secteur oligopolistique comme le sont nos banques canadiennes, les pétrolières, les pharmaceutiques, les faiseux de l’internet (Bell, Telus, Rogers et Vidéotron), l’alimentation au détail (Métro, IGA et Provigo-Loblaw), le CN-CP, Visa-Mastercard, etc. Le CN, cette ancienne société d’État, dont le principal actionnaire est l’américain Bill Gates, qui détient des millions d’actions, soit environ 14% du contrôle : «Bill Gates hausse sa mise dans le CN» (Le Journal de Montréal, 17 août 2019).

Imaginez le drame d’une hausse de l’impôt fédéral

Aux États-Unis, Joe Biden va augmenter le taux d’impôt fédéral sur le revenu des compagnies de 21% à 28%. Au Canada, il était également de 28% à Ottawa en 2000, mais suite aux pressions du patronat et de leurs mercenaires universitaires et médiatiques, le gouvernement fédéral l’a réduit graduellement au fil des ans et s’élève depuis 2012 à seulement 15% contre 21% du temps de Trump, aux States, qui passera bientôt à 28%. D’ailleurs, tous les organismes internationaux, tels le FMI, l’OCDE et la Banque mondiale, suggèrent fortement aux États de hausser l’impôt des compagnies et des riches : «La reprise aura besoin d’une injection d’équité. Les gouvernements du monde devront notamment améliorer leur filet social, selon le FMI… en haussant l’impôt sur le revenu des compagnies et des riches, les impôts fonciers municipaux, les impôts successoraux, etc.» (Le Devoir, 2 avril 2021). Ce n’est pas ce que pensent nos misérables experts affranchis d’ici.

Quelle mouche a piqué Justin?

Alors, face aux astronomiques bénéfices de nos banques canadiennes, voulant simplement appliquer les recommandations du FMI et de la Banque mondiale, et faire comme Joe Biden aux États-Unis afin d’éponger les énormes déficits occasionnés par le coronavirus, imaginez-vous donc que Justin Trudeau a osé exprimer le souhait d’augmenter le taux d’impôt sur le revenu fédéral de 15% à seulement 18% (il faudrait, selon moi, le hausser davantage) alors qu’il sera de 28% aux États-Unis. Rien de plus normal que vous allez me dire de taxer un peu plus les banques, elles qui se vantent tout le temps de leur responsabilité sociale, comme dans ce publireportage présenté comme un article objectif dans Le Devoir du 9 avril 2021 : «Le patron de la Banque Royale (RBC) plaide pour un Canada plus vert et plus inclusif (mais qui ne doit pas irriter le paisible milieu bancaire avec des impôts encombrants)». Oh que c’était beau d’avoir entendu la Toronto-Dominion Bank clamer en toute bienveillance : «Le Canada doit agir contre la montée des inégalités (sans taxer davantage les riches et les compagnies), dit la TD. La fiscalité canadienne gagnerait à être plus progressive (en imposant les autres, surtout la classe moyenne et en tarifiant généreusement les services publics, tout en évitant de taxer les banques)» (Le Devoir, 25 novembre 2014).

Trudeau commet un sacrilège fiscal et les banques sont furieuses

D’avoir suggéré une telle calamité, c’est à se demander si le Parti libéral du Canada est tombé sur la tête? «Trudeau promet de taxer davantage les institutions financières» (Le Devoir, 26 août 2021). Les banques et leurs commis médiatiques et universitaires n’ont pas tardé à réagir à cette dernière cette attaque fiscale. Oui à une fiscalité plus progressive qu’a dit la Toronto Dominion Bank, mais pas touche à l’impôt des banques et à leurs paradis fiscaux. Pour reprendre la parole du poète : «l’impôt c’est pour le monde ordinaire». Alors, le lendemain de l’incivilité fiscale de Justin Trudeau, les boss de la Banques CIBC (Canadian Imperial Bank of Commerce) ont réagi agressivement afin de défendre leurs privilèges et leurs vaches sacrées : «La CIBC défend (oh surprise) les banques en réplique à Trudeau. Le premier ministre canadien a proposé d’augmenter le taux d’imposition de l’industrie» (Le Devoir, 27 août 2021).

Le chroniqueur émérite du JDM à la défense des banques

Le 31 juillet 2021, le chroniqueur Michel Girard du Journal de Montréal a pondu et signé cet émouvant éditorial : «Trudeau s’attaque (en voulant hausser le taux d’impôt fédéral des banques de 15% à 18% contre 28% aux States) aux petits actionnaires». Ça prend un ignare ou un vendu pour venir nous dire en pleine face et sans rire qu’il serait injuste d’augmenter l’impôt des banques canadiennes, même si elles engrangent des profits records, car comme plusieurs retraités sont indirectement actionnaires des banques par le biais de leur caisse de retraite, cela constitue, selon le majordome médiatique (il faut dire que les banques sont des gros annonceur dans tous les organes de l’empire Québecor), une attaque sauvage contre les pauvres petits actionnaires. C’est comme ça que nos médias représentent des sources d’aliénation et d’asservissement.

La logique tordue du chroniqueur du JDM

Il est vrai, comme le dit Michel Girard, que les caisses de retraite sont d’importants actionnaires des banques canadiennes. Mais ramené au nombre d’actions détenu par chaque retraité dans leur caisse de retraite, cela revient, gros max, à quelques dizaines d’actions que chacun possède indirectement. Comme à l’UQAM, qui compte plusieurs milliers d’employés retraités, il est probable que notre caisse de retraite détient plusieurs milliers d’actions des banques, mais divisé et ramené par employé ça ne fait pas beaucoup contrairement aux vrais gros actionnaires individuels, par le biais de leurs sociétés de gestion, fiducies, compagnies à numéro, etc. qui détiennent chacun des milliers et des millions d’actions dans plusieurs banques canadiennes. À entendre les inepties de Michel Girard, on croirait que les banques «socialistes» sont détenues par les petits actionnaires pas très riches. Ça s’apparente à du communisme.

En 2004, prenant des données de Statistique Canada, le Centre canadien de politiques alternatives (The CCPA Monitor, novembre 2004) affirmait que le 20% des gens les plus riches au Canada détenait 94% des actions de compagnies, le 20% suivant en détenait 5% et le 60% restant un gros 1%. Il faut croire que Michel Girard n’a jamais entendu parler du 1% et des odieuses inégalités économiques.

Quel faux prétexte ridicule avancé par Michel Girard pour ne pas taxer les banques car cela pénaliserait supposément les petits actionnaires. En passant, la majorité des travailleurs canadiens ne sont pas syndiqués ou ont de très petites pensions de retraite. Si on suit la logique tordue et intéressées du chroniqueur, il ne faut pas augmenter non plus l’impôt de d’autres compagnies comme le CN, le CP, Bell, Exxon, Pfizer, Métro et d’autres, car les caisses de retraite ont également plusieurs actions dans ces compagnies. En fait, il ne faut pas taxer les compagnies et surtout, les grosses comme Québecor, qui prêchaient pour sa paroisse, paie des impôts pas très élevés.

Et Le Devoir qui agit aussi comme laquais de la classe dominante

La même journée de la creuse chronique de Michel Girard dans le Journal de Montréal, soit le 31 août 2021, paraissait dans Le Devoir le vibrant plaidoyer du directeur de la Fédération canadienne des contribuables, un organisme patronal (malgré son nom vertueux) qui, à l’aide de sophismes, de demi-vérités et de raccourcis intellectuels nous a sorti pour la millionième fois les mêmes arguments éculés à l’effet qu’il ne faut pas taxer les plus riches car ils sont déjà supposément surtaxés (ce n’est pas ce que disent le FMI et Biden), sont très mobiles et ont de très bons fiscalistes imaginatifs à leur emploi. Et Le Devoir qui publie ça!: «Ne comptez pas sur le 1%». Bon, la question qui assomme avant de finir : s’il ne faut pas taxer les grosses compagnies, les grosses banques et les milliardaires, il reste qui à taxer?

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