Essence : la solution afin d’arrêter de se faire voler

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/549892/demantelement-raffinerie-shell

Moins de concurrents au détail

Mes amis, les plus âgés vont s’en rappeler. Dans les années 50 et 60, on dénombrait au Québec plusieurs transnationales pétrolières qui se faisaient concurrence sur le marché du détail : British American Oil, Shell, Sunoco, Gulf, Esso, Texaco, Pétrofina et j’en passe. Après concertation, les multinationales pétrolières en personnes bien élevées se sont sereinement partagé les marchés du détail dans le monde afin de mettre fin à cette concurrence trop féroce. Ainsi donc au Québec, Sunoco, Gulf, Texaco et compagnie ont laissé toute la place au certel actuel formé de Shell (Royal Dutch Shell), Esso (Exxon-Mobil), Ultramar (Valero) et Pétro-Canada (Suncor), notre ex-société d’État privatisée pour pas grand-chose. Appelons ça une concurrence teintée de franche camaraderie dans laquelle elles vendent toutes au même prix et les augmentent en chœur en même temps.

Fermeture de 5 raffineries au Québec

Dans les années 80, BP, Esso, Gulf et Texaco ont fermé leur raffinerie à Montréal puis vint en 2010 celle de Shell : «Shell ferme sa raffinerie. Montréal perd 500 emplois» (La Presse, 8 janvier 2010).

Au diable les lois prétendument naturelles du marché

Complètement à l’encontre des pseudo-lois naturelles du marché : la demande augmente et l’offre de raffinage diminue. Si elles le pouvaient, les géants pétroliers occidentaux réduiraient aussi sciemment l’offre de pétrole brut dans le monde qu’elles contrôlent que partiellement : la Russie, le Venezuela, le Mexique, l’Arabie saoudite, la Norvège et d’autres ne l’entendent pas ainsi. Dans ces derniers pays, le pétrole est contrôlé et détenu par des sociétés à propriété collective.

Alors, moins de raffineries font que les marges augmentent considérablement, faute de concurrence, comme c’est le cas actuellement au Québec, qui ne compte que deux raffineries, soit celles de Shell et d’Ultramar : «Les raffineries montrées du doigt. La marge actuelle est exceptionnellement élevée remarque la présidente de l’Association des distributeurs d’énergie du Québec, Sonia Marcotte. Sur un prix à la pompe à 2,17$ à Montréal, 48 revenaient aux raffineries» (Radio-Canada, 19 mai 2022).

La vague de fermetures de raffineries remonte aux années 70

Il faut savoir que les pétrolières occidentales sont intégrées verticalement de l’exploration à la production de pétrole brut, en passant par les raffineries avant d’aboutir à la vente au détail dans leurs propres stations-services ou celles de franchisés. Et la fermeture planifiée de raffineries ne date pas de hier, comme l’illustre fort bien cet article du Journal Les Affaires publié le 9 juin 2007 : «Prix de l’essence élevés : c’est la faute au raffinage! Il y a deux fois moins de raffineries en Amérique du Nord que dans les années 1970 et 1980 : 276 à 148 aux États-Unis et 40 à 18 au Canada».

Le pire dans tout ça est qu’au Québec, c’est le cartel pétrolier (Shell, Esso, Ultramar et Suncor) qui décide où il va acheter le pétrole brut. Bien évidemment, ils vont l’acquérir à gros prix de leurs filiales qui produisent justement du pétrole brut et situées aux États-Unis, en mer du Nord en Grande-Bretagne, au Nigeria, en Irak, etc. et autres pays dits en développement qui se sont fait voler leurs ressources naturelles par des Occidentaux avec l’appui d’élus locaux corrompus comme au Congo par exemple.

Moins de raffineries jumelées à l’intégration verticale, ça donne…

L’histoire se répète tout le temps et nos élus ne font rien. On est pris en otage par les transnationales occidentales du pétrole et ce depuis longtemps comme l’indique le titre de ces articles remontant à 2008 :

  • «Pétrole brut. Le prix du brut diminue mais la marge de raffinage augmente» (Le Devoir, 17 septembre 2008);
  • «Les raffineurs et détaillants (qui ont les mêmes propriétaires) d’essence gonflent les prix» (Le Journal de Montréal, 3 octobre 2014).

Impact des fusions-acquisitions dans l’industrie du pétrole

Moins de raffineries, moins de stations-services et moins de concurrents ça s’appelle un oligopole. Au cours des trente dernières années, on a en plus assisté à d’importants regroupements de pétrolières occidentales déjà énormes. Il y a eu, entre autres, les fusions-acquisitions de Conoco-Phillips, d’Exxon-Mobil, de Chevron-Texaco, de BP-Amoco, etc., formant ainsi des mastodontes plus riches et plus puissantes que les États et qu’ont été renforcis par les traités de libre-échange et par les milliards versés en subventions par leurs gouvernements. Elle est où alors la liberté du consommateur? Vrai qu’il peut choisir d’acheter son essence au Québec parmi quelques pétrolières mais elles affichent toutes, comme par hasard, les mêmes prix et décident toutes de les augmenter en même temps.

Ils admettent que l’on se fait «fourrer»

En 2018, Philippe Couillard, alors premier ministre libéral du Québec, admettait candidement ce fait : «La variation des prix de l’essence est apparemment concertée, dit Couillard» (Le Devoir, 31 mai 2018). Même l’institution financière Desjardins affirmait ce fait de gros bon sens en 2012 : «Bond de 10 cent le litre à Montréal. Une hausse injustifiée selon Desjardins» (La Presse, 6 janvier 2012). Alors, même quand nos élus reconnaissent eux-mêmes qu’on se fait arnaquer en permanence par les pétrolières, pourquoi ils n’interviennent pas pour faire arrêter ce vol institutionnalisé, surtout lorsque l’on prétend que dans nos démocraties, c’est le gouvernement qui mène et que le peuple est souverain?

Pour certains élus, il faut se laisser faire

En 2000, excédés par d’autres hausses abusives et planifiées par les pétrolières occidentales, même après qu’elles aient reçu du gouvernement une subvention (rabais) de 4,7 cents le litre, les gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean sont descendus dans la rue afin de protester. Cette action ingrate a énormément déplu à notre premier ministre péquiste du temps, celui qui plus tard, oh hasard, allait devenir le président de l’Association des producteurs de pétrole du Québec : «Lucien Bouchard déplore le boycott des pétrolières» (Le Journal de Montréal, 18 avril 2000). On se fait rouler tout rond et on ne peut même pas protester. Des politiciens au service de qui au juste?

En 2009, une autre drôle émanant cette fois du ministre libéral des Ressources naturelles d’alors, feu Claude Béchard, qui avait supplié les pétrolières à plus de transparence dans la «justification» de leurs hausses du prix de l’essence : «Coût de l’essence. Québec (PLQ) invite les pétrolières à collaborer» (La Presse, 5 avril 2009). Une «invitation» à «collaborer», voilà la solution! Les libéraux de Charest se sont montrés plus braves face aux syndicats des travailleurs ordinaires et dans leurs généreuse coupures effectuées dans nos services publics. Les pétrolières auraient pu répondre au ministre libéral : «Commencez donc par être transparents vous-mêmes au parti libéral du Québec».

Mais la meilleure est venue de mon politicien préféré, le frisé de Sherbrooke, Jean Charest, qui a justifié ainsi son inaction crasse face aux hausses répétées du prix de l’essence : «Pas de prix plafond à l’horizon. Jean Charest préfère laisser la concurrence influer sur le prix de l’essence» (Radio-Canada, 3 mai 2011). Elle est où la concurrence dans l’industrie pétrolière? Les propos de Jean Charest s’apparentent à inviter les pétrolières à continuer à sévir sans irritant et avec la bénédiction du gouvernement. Et dire que ça veut devenir premier ministre conservateur du Canada.

Pour stopper le vol, il faut créer Pétro-Québec

Il serait si simple de créer Pétro-Québec, qui serait mandaté pour s’occuper de l’importation du pétrole brut ou raffiné au meilleur prix. Ce n’est plus les grosses pétrolières occidentales présentes au Québec (Shell, Esso, Ultramar et Suncor) qui décideraient de quel pays l’acheter et de quelle compagnie, souvent leurs compagnies apparentées. Ainsi, mettrait véritablement en concurrence des pays gros producteurs qui se feraient un plaisir de signer avec Pétro-Québec des contrats d’achats de pétrole à long terme, que ce soit la Russie, la Norvège, l’Iran, le Mexique, etc. Il faut briser ce cartel intégré verticalement.

Le PLQ s’est écrasé en 2010

En 2010, on avait une chance en or de créer Pétro-Québec en s’appropriant la raffinerie de Shell à Montréal, qu’ils ont fermé et démantelé même si plusieurs acheteurs s’étaient montrés intéressés à l’acquérir : «Trois acheteurs pour la raffinerie Shell» (La Presse, 12 mai 2010). Offres rejetées bien évidemment par la direction de Shell sous des prétextes farfelus et frivoles : «Nathalie Normandeau (PLQ) signe la fin de la raffinerie Shell à Montréal-Est» (Le Devoir, 28 juin 2011). Même si l’ex-ministre libéral des ressources  naturelles, John Ciaccia, avait affirmé ceci en 2010 : «Après la fermeture  Gulf (raffinerie), en 1986, Québec s’est donné les moyens d’agir. La fermeture de Shell constitue le premier test de la loi de John Ciaccia» (Le Devoir, 18 septembre 2010). Test que le PLQ a volontairement échoué. Le ministre libéral Raymond Bachand, devenu lobbyiste, avait fait semblant de montrer les crocs en disant : «Shell doit s’expliquer» (Le Devoir, 14 juin 2010). Naturellement, les explications ne sont jamais venues.  

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